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Channel: Saint-Pierre-des-Corps, les épines fortes » Economie
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Sur les traces des maraîchers

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Au premier abord, Saint-Pierre-des-Corps est une ville de banlieue comme il en existe des centaines : beaucoup de maisons pavillonnaires, quelques tours, des entreprises, des zones industrielles et puis une gare. Mais en Touraine, on connaît bien la singularité de ce bastion communiste. Son histoire ouvrière et ferroviaire reste présente dans les esprits. En revanche, ce qui s'est passé avant l'arrivée du rail est moins connu. Là où tout est bâti aujourd'hui, le sol a été le gagne-pain de générations de Corpopétrussiens. Sur cette terre sablonneuse enrichie du limon de la Loire - les varennes - pendant des siècles, les maraîchers ont fait pousser des légumes et des fruits. Difficile à croire aujourd'hui mais il y a cent ans, Saint-Pierre-des-Corps était encore le potager de Tours.

A Saint-Pierre-des Corps, en 1938, on compte 28 exploitations maraîchères, 24 en 1945, 3 en l’an 2000 et une aujourd'hui. © Document de l'Association pour l'étude de l'histoire et de la vie sociale à Saint-Pierre-des-Corps

Un passé que la municipalité a choisi de mettre à l'honneur sur l'avenue Jean-Bonnin, la grande voie d'entrée dans la ville : une structure métallique et grillagée censée représenter une serre, un grand réservoir à eau rouillé juché à plusieurs mètres du sol, quelques rails enfouis dans l'herbe et sur lesquels on poussait jadis les wagonnets de légumes… Un passé muséifié mais dont il ne reste, finalement, plus grand chose. Quelques granges de-ci de-là. Parfois, au détour d'une rue, s'ouvre encore un passage étroit, une « rotte » sablonneuse qui conduisait aux parcelles maraîchères. Et, dans les 120 parcelles de jardins familiaux, vestiges de ce passé et elles aussi grignotées par l'urbanisation, on peut encore voir quelques
« cigognes », ces puits à balancier qui permettent d'aller chercher, à quelques mètres sous terre, l'eau du lit de la Loire.

Aquilès Sala, chef d'une exploitation horticole jusqu'en 2000, se souvient de la tradition maraîchère de Saint-Pierre-des-Corps.

Le Vieux-Saint-Pierre, la partie de la ville qui jouxte Tours, nous réserve cependant une surprise. En plein milieu d'un lotissement de plus d'une centaine de maisons de ville subsiste un terrain clos de murs derrière lesquels on aperçoit de vieilles serres. Leur propriétaire, M. Daloux, est un résistant. « Maison Daloux », tient-il à préciser en se présentant. Horticulteur, fils d'horticulteur, petit-fils d'horticulteur  - ses grands-parents se sont installés ici en 1914 - le vieil homme continue de cultiver son potager. On l'a bien approché pour lui monnayer le terrain, mais il a toujours refusé de vendre ce bout de terre. Il est en friche, le circuit d'arrosage hors d'âge, les outils rouillent. Qu'importe ! M. Daloux s'accroche à ce patrimoine, au souvenir d’une vie de travail, au passé qu'il refuse de voir rayer de la carte sans ménagement.

Aujourd'hui, il faut aller à l'autre bout de la ville et zigzaguer entre les entrepôts de la zone industrielle, bien au-delà de la gare, pour trouver le dernier maraîcher de Saint-Pierre-des-Corps. Didier Renard tient toujours l'exploitation héritée de ses parents : quatre hectares en production raisonnée. Mais pour combien de temps ? Ironie du sort, ses terres sont situées juste en face du bâtiment de l'ancienne coopérative maraîchère de Touraine devenue un entrepôt… Dans quelques années, Didier Renard prendra sa retraite. Qui prendra la suite ? Son fils ? Un autre
exploitant ? Il n'en sait rien. Mais peut-être lui faudra-t-il se résigner, comme bien d'autres ici ont dû le faire avant lui, à vendre ses terrains à un promoteur immobilier…

Les maraîchers. Au fond, le château d'eau de la SNCF et, à sa droite, la maison des sous-chefs de dépôt. Les années 1920. © Document de l'Association pour l'étude de l'histoire et de la vie sociale à Saint-Pierre-des-Corps.

Didier Renard comme son collègue horticulteur, Aquilès Sala, dont l’exploitation reprise par son fils Bruno est située près de la Loire, sont fatalistes : « Il n'y a plus assez de terrains pour travailler correctement en maraîchage ou en horticulture à Saint-Pierre, tout est construit. Il ne reste que les petits jardins familiaux. Le maraîchage s'est déplacé en aval et en amont de la Loire », explique ce dernier. Les collectivités locales se sont bien saisies du problème – le conseil général peut financer l'installation d'agriculteurs en partenariat avec la chambre d'agriculture et l’association Inpact 37 – mais l'occasion ne s'est, jusque-là, pas présentée ici.

La mairie de Saint-Pierre-des-Corps en 1922. © Carte postale fournie par Eric Caillé http://saintpierredescorpsgradlabolchevik.blogspot.fr/

Pourtant, pour protéger l'environnement, on sait désormais l'utilité d'avoir des circuits courts d'approvisionnement. Des maraîchers de la lointaine périphérie viennent encore sur les marchés de Saint-Pierre-des-Corps. Mais il suffirait de peu pour que la ville retrouve en ce domaine son autonomie. L'association Terre de liens, qui aide à l'installation de fermes de proximité, a mis au point un « convertisseur » qui lui permet de calculer la surface de terre nécessaire à l'autosuffisance maraîchère d'une agglomération. Pour Saint-Pierre-des-Corps : 52 hectares de légumes et 16 hectares de pommes de terre. C'est finalement peu pour une commune qui s'étend sur 1100 hectares. On peut toujours rêver…


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